En France, la loi impose une visite médicale obligatoire aux conducteurs professionnels, mais elle l’exige rarement pour les titulaires du permis de conduire classique, quel que soit leur âge. Pourtant, certaines pathologies peuvent entraîner une suspension ou un retrait du permis, même en l’absence de plainte ou d’accident.
Des troubles cognitifs diagnostiqués, une perte d’acuité visuelle soudaine ou une maladie évolutive figurent parmi les motifs d’alerte. Les médecins ont l’obligation de signaler toute inaptitude manifeste, mettant en jeu la sécurité publique et la responsabilité individuelle.
Conduire en vieillissant : quels sont les enjeux de santé à connaître ?
Rouler longtemps sans jamais croiser de médecin, c’est la réalité pour nombre de conducteurs âgés en France. Ici, nul passage systématique devant un professionnel de santé pour conserver son permis avec l’âge : tant qu’aucune maladie n’est signalée, la route reste ouverte. Cette particularité hexagonale contraste nettement avec les pratiques de pays voisins comme le Portugal, l’Espagne, l’Italie, le Danemark ou le Royaume-Uni, où les conducteurs seniors passent régulièrement par la case contrôle médical pour renouveler leur titre de conduite.
En France, la sécurité routière fait confiance à chacun : à chaque conducteur d’évaluer honnêtement sa santé et d’alerter en cas de défaillance. Mais la réalité, c’est qu’avec les années, les risques augmentent : vue qui baisse, réflexes qui s’émoussent, troubles cognitifs qui s’installent parfois sans bruit. Cette autonomie accordée aux seniors suscite un débat brûlant : où placer le curseur entre liberté et protection collective ?
En l’absence de contrôle médical généralisé, la vigilance repose sur le regard du médecin traitant, qui doit signaler tout risque avéré. Une position délicate, coincée entre respect de la vie privée et devoir d’alerte. Évaluer si une personne peut continuer à conduire devient alors un exercice d’équilibriste, entre intérêt individuel et sécurité de tous.
Visite médicale du permis de conduire : une étape essentielle pour les conducteurs âgés
Dès qu’une maladie susceptible de gêner la conduite est diagnostiquée, c’est au conducteur de déclarer la situation à la préfecture et de passer une visite médicale. Rien d’automatique : la France laisse le choix, là où d’autres pays imposent un contrôle régulier pour les automobilistes âgés. Ici, tout repose sur la conscience individuelle et sur le médecin agréé, seul habilité à trancher.
Le praticien, mandaté par la préfecture, examine finement les capacités physiques, sensorielles et intellectuelles du candidat. En cas d’incertitude, il peut recommander un test psychotechnique : mémoire, rapidité de réaction, perception de l’environnement. Ce complément d’enquête vient affiner l’examen médical classique, pour détecter la moindre faille qui pourrait devenir dangereuse au volant. Toute cette procédure s’inscrit dans le cadre de la réglementation : l’arrêté du 28 mars 2022 et l’article R226-1 du Code de la route listent les pathologies incompatibles avec la conduite.
La décision médicale ne rime pas forcément avec retrait définitif du permis. Selon le cas, une adaptation du véhicule ou une durée limitée de validité (parfois un an, parfois cinq) permettent de conserver la possibilité de conduire. Si le conducteur conteste le diagnostic, il peut solliciter la commission médicale départementale pour un nouvel avis. À noter : ces visites et tests restent à la charge de l’usager, l’Assurance Maladie ne les prend pas en charge.
Troubles cognitifs et maladies fréquentes : comment impactent-ils la sécurité au volant ?
Derrière chaque décision sur la route, il y a le cerveau, chef d’orchestre d’une série de gestes précis. Dès qu’un trouble cognitif s’immisce, toute cette mécanique se dérègle. La maladie d’Alzheimer, dès le stade 3 sur l’échelle de Reisberg, ferme la porte à la conduite : désorientation, perte de mémoire immédiate, gestes routiniers oubliés, rien ne va plus. Impossible de gérer une intersection complexe ou de réagir à l’inattendu.
L’épilepsie figure aussi sur la liste noire : une seule crise dans l’année suffit à interdire la conduite, car le risque de perte totale de contrôle du véhicule est trop grand. Même vigilance après un accident vasculaire cérébral : selon l’étendue des séquelles neurologiques, le permis peut être suspendu temporairement ou retiré. Les troubles psychiatriques sévères, la dépendance à l’alcool, aux stupéfiants ou aux médicaments psychotropes, ainsi que les troubles du sommeil (endormissement inopiné, vigilance réduite, réflexes moins sûrs) sont autant de pièges pour la sécurité routière.
Le champ de vision et l’acuité visuelle sont scrutés à la loupe : la règlementation impose un minimum de 5/10 pour les deux yeux ensemble. Descendre en dessous, c’est s’exposer à une interdiction, sauf exception très encadrée. Le diabète, lui, peut provoquer des malaises imprévisibles en cas d’hypoglycémie : contrôles réguliers et parfois suspension du permis s’imposent.
Voici d’autres pathologies à surveiller attentivement selon les autorités de santé :
- Pathologies cardiaques : risques de malaise, surtout si la tension artérielle n’est pas stabilisée.
- Déficience mentale : incompatibilité stricte avec la conduite.
L’analyse médicale de ces affections conditionne le droit de conduire. Seul le médecin agréé peut décider, pour protéger à la fois le conducteur et tous ceux qui partagent la route.
Reconnaître les signes qu’il est peut-être temps d’arrêter de conduire
Une hésitation au moment de tourner, une sortie manquée, ou cette difficulté soudaine à juger les distances : autant d’alertes qui doivent inciter à la prudence. Le conducteur n’a pas toujours conscience de ses propres limites, mais l’entourage, lui, ne s’y trompe pas. Les proches remarquent vite les oublis d’itinéraire, les réactions plus lentes, les petits accrochages répétés. Quand ces signes s’accumulent, la sécurité de tous est en jeu.
Il existe d’autres indices à prendre au sérieux : multiplication des erreurs de priorité, confusion entre les pédales, anxiété dès que la circulation devient dense. Certaines personnes tentent de réduire les risques en ne conduisant que sur de courts trajets ou en évitant les heures de pointe, mais quand la santé se fragilise, le danger ne disparaît pas pour autant. Troubles visuels, auditifs ou cognitifs peuvent transformer un rond-point anodin en véritable casse-tête.
Le cadre légal ne laisse aucune place à l’ambiguïté : si un accident survient à cause d’une maladie non déclarée, l’assurance ne couvre pas le conducteur. La responsabilité personnelle est totale. Dès les premiers doutes, il faut consulter un médecin agréé pour un bilan médical. Certaines mutuelles santé proposent des services d’accompagnement pour organiser l’après-permis : solutions de transport adaptées, conseils pratiques, alternatives pour rester autonome sans exposer les autres au danger.
Au bout du compte, garder ou rendre son permis n’est jamais anodin. C’est parfois accepter de passer le relais, pour que la route reste un espace partagé en confiance.


